- ÉCLIPSES
- ÉCLIPSESTous les corps du système solaire tiennent leur luminosité du Soleil. Un corps est éclipsé totalement ou partiellement si tout ou partie de ce corps est plongé dans l’ombre projetée par un autre corps. Ainsi, la Terre engendre un cône d’ombre à l’opposé du Soleil; quand la Lune ou un satellite artificiel s’y trouvent complètement plongés, ils cessent d’être éclairés: il y a éclipse totale de ces corps.Quand la Lune passe entre le Soleil et la Terre, elle peut masquer tout ou partie du Soleil, car leurs diamètres apparents sont voisins (0,50). Il ne s’agit évidemment pas d’une éclipse au sens où nous l’avons définie (le Soleil ne cesse pas d’être éclairé!), mais d’une occultation du Soleil par la Lune. Cependant, la tradition donne à ce phénomène le nom d’éclipse de Soleil, que nous conserverons.Possibilité des éclipsesSupposons que l’orbite de la Lune autour de la Terre soit dans le plan de l’écliptique, plan de l’orbite de la Terre autour du Soleil. Au moment de la pleine Lune, la Terre s’interpose devant le Soleil, mais il faut calculer si, compte tenu des dimensions de la Terre et du Soleil ainsi que de leur distance mutuelle, le cône d’ombre formé est assez allongé pour que la Lune s’y trouve plongée.R (6 378 km) et r (696 000 km) étant les rayons de la Terre et du Soleil, respectivement, et D (de l’ordre de 149 597 800 km) la distance Terre-Soleil, la distance x entre le centre de la Terre et le sommet du cône d’ombre (fig. 1 a) est égale à RD /(r 漣 R ) = D /108, soit environ 1 384 000 kilomètres. La Lune, dont la distance à la Terre est en moyenne égale à 380 000 kilomètres, peut donc bien être plongée dans le cône d’ombre.À chaque nouvelle Lune, la Lune est alignée avec le Soleil et la Terre, et située entre eux. Soit r (1 738 km) le rayon de la Lune, D la distance Lune-Soleil (149 220 000 km environ); la distance x du centre de la Lune au sommet du cône d’ombre formé par le Soleil et la Lune est égale à r D /(r 漣 r ), soit environ 374 000 kilomètres.La distance de la Terre à la Lune pouvant varier de 364 000 à 405 900 kilomètres, la Terre peut se trouver en partie dans le cône d’ombre projeté par la Lune mais elle ne peut pas y être plongée totalement; elle peut aussi se trouver au-delà du sommet du cône. Si la Terre se trouve entre la Lune et le sommet du cône, il y a une éclipse totale de Soleil en certains points de la Terre; si elle se trouve au-delà du sommet du cône, on observe une éclipse annulaire en certains points de notre planète (cf. infra ).Le sarosLe plan de l’orbite de la Lune ne coïncide pas avec le plan de l’écliptique mais forme un angle de 5,130 avec lui. Par conséquent, pour qu’il y ait une éclipse de Lune ou de Soleil, il ne suffit pas que la Lune soit en syzygie (c’est-à-dire pleine ou nouvelle); il faut de plus qu’elle soit voisine de l’écliptique, donc des points d’intersection – les nœuds – de son orbite avec ce plan. Quand la Lune traverse l’écliptique en allant de l’hémisphère Sud à l’hémisphère Nord, elle passe au nœud ascendant; quand elle le traverse en allant de l’hémisphère Nord à l’hémisphère Sud, elle passe au nœud descendant.Supposons qu’une éclipse de Lune ou de Soleil vienne de se produire. Au bout d’un nombre entier de révolutions synodiques (ou mois lunaires), la Lune est revenue dans la même position relative par rapport au Soleil, c’est-à-dire qu’elle est de nouveau pleine ou nouvelle. Par ailleurs, au bout d’un nombre entier de révolutions draconitiques, la Lune est revenue, par définition de la révolution draconitique, au voisinage du nœud, ascendant ou descendant, où l’éclipse s’est produite.La durée de la révolution synodique est de 29,531 jours, celle de la révolution draconitique de 27,212 jours; 223 révolutions synodiques valent donc à peu près 242 révolutions draconitiques (6585,3 j). Au bout de ce temps, les conditions qui ont entraîné une éclipse se retrouvent identiques, si bien qu’une autre éclipse se produit. La période de 223 lunaisons, soit presque exactement 18 ans 11 jours (ou 18 ans 10 jours s’il y a cinq années bissextiles dans l’intervalle de temps considéré), s’appelle le saros. Comme 223 lunaisons excèdent les 18 ans 11 jours d’environ un tiers de jour, les régions de la Terre intéressées par l’éclipse sont décalées en longitude d’environ 1200 d’une éclipse à la suivante puisque la Terre a tourné d’un tiers de tour supplémentaire.Éclipses de LuneLa figure 1a montre les cônes d’ombre et de pénombre portés par la Terre. Quand la Lune est dans la région 1, il y a éclipse par l’ombre, totale si la Lune y est tout entière plongée, partielle si une partie seulement de la Lune s’y trouve. Dans la région 2, il y a éclipse par la pénombre, les points qui s’y trouvent n’étant pas éclairés par tous les points du Soleil (il y a éclipse partielle de Soleil par la Terre en ces points pour quelqu’un qui se trouverait à la surface de la Lune), d’où, vue de la Terre, un léger assombrissement de la surface de la Lune.La figure 1 b représente les sections des cônes d’ombre et de pénombre par un plan perpendiculaire à leur axe commun et situé à la distance de la Terre où se trouve la Lune. Soient 福 et 福 les rayons angulaires de ces disques vus de la Terre; 福 est égal à environ 1,4 fois le diamètre apparent de la Lune, 福 à 2,4 fois ce même diamètre.La Lune se déplace d’ouest en est sur la sphère céleste en parcourant 13,176 40 par jour. La trajectoire apparente du centre de la Lune est, au voisinage des disques 1 et 2, une droite qui fait un angle de 5,130 avec l’écliptique (inclinaison de l’orbite lunaire).Si la Lune suit un chemin tel que A, il n’y a pas d’éclipse, le point O, centre des disques 1 et 2 étant trop loin du nœud de l’orbite lunaire (que l’on a supposé sur la figure être le nœud ascendant).Si la Lune suit le chemin B, il y a éclipse par la pénombre. Même si elles sont totales, les éclipses par la pénombre n’ont rien de remarquable et elles ne sont pas toujours signalées dans les éphémérides.Si la Lune suit le chemin C, il y a éclipse par l’ombre, mais partielle seulement. Sur le chemin D, la Lune subit une éclipse totale mais, évidemment, l’éclipse est d’abord partielle, l’ombre gagnant la Lune par le bord est. Compte tenu du rayon du disque 1, du rayon apparent de la Lune et de la vitesse angulaire de la Lune sur la sphère céleste, la durée de la totalité d’une éclipse de Lune peut atteindre 1 heure 45 minutes.On définit la grandeur d’une éclipse de Lune comme étant la distance du bord éclipsé au bord de l’ombre au milieu de l’éclipse, le diamètre apparent de la Lune étant pris comme unité. Si l’éclipse est totale, la grandeur est égale ou supérieure à 1.Le calcul des circonstances d’une éclipse de Lune est relativement facile. Le phénomène ne dépend pas de la position de l’observateur à la surface de la Terre.Pour calculer les différentes phases de l’éclipse, on utilise une éphéméride qui donne les coordonnées équatoriales de la Lune et du Soleil, ainsi que les distances Terre-Soleil et Terre-Lune, quantités que l’on suppose varier linéairement au voisinage du maximum de l’éclipse. On en déduit aisément les instants des contacts du bord lunaire avec le cône d’ombre.Éclipses de SoleilSupposons que le cône d’ombre proprement dit, c’est-à-dire en en excluant la partie au-delà de son sommet, rencontre la surface de la Terre. Il y découpe un petit ovale d’environ 200 kilomètres de diamètre à l’intérieur duquel l’éclipse est totale. Du fait du mouvement de la Lune par rapport à la Terre et de la rotation de la Terre autour de son axe, cet ovale balaye la surface de la Terre en engendrant une bande, dite de totalité, de quelques milliers de kilomètres de longueur; dans cette bande, on observera une éclipse totale (fig. 2). À l’intérieur de la bande de totalité se trouve la ligne de centralité, lieu de l’intersection de l’axe du cône d’ombre avec la Terre (il se peut, au voisinage de l’un des pôles, qu’une éclipse soit totale sans que l’axe du cône d’ombre rencontre la Terre, autrement dit sans que l’éclipse soit centrale; il s’agit d’un phénomène rare). Bien entendu, en un point de la bande de totalité, l’éclipse est d’abord vue comme partielle, la Lune cachant le bord ouest du Soleil; elle devient totale puis de nouveau partielle, la Lune quittant le Soleil au bord est de celui-ci.La figure 3 illustre les différents types d’éclipses de Soleil. En (1), il y a éclipse totale; en (3), il y a éclipse partielle. Si, tout en étant centrale, l’éclipse est telle que ce soit la portion du cône d’ombre située au-delà du sommet qui coupe la surface de la Terre, l’éclipse est dite annulaire (région 2); la Lune ne masque alors jamais complètement le disque du Soleil qui, au maximum de l’éclipse, est limité à un anneau brillant autour du disque sombre de la Lune.Enfin, il se peut qu’une éclipse ne soit totale en aucun point de la Terre, tout en étant partielle en certains endroits.On appelle grandeur de l’éclipse la fraction éclipsée du diamètre solaire au maximum de l’éclipse. Si l’éclipse est totale, la grandeur peut être supérieure à 1.La durée d’une éclipse de Soleil est variable mais ne dépasse guère sept minutes. On a pu observer des éclipses de Soleil plus longuement à bord d’avions supersoniques, l’observateur s’efforçant de suivre le cône d’ombre portée de la Lune.Les circonstances d’une éclipse de Soleil ne se déterminent pas aussi facilement que celles d’une éclipse de Lune. Les astronomes publient des quantités appelées éléments de Bessel qui permettent aux observateurs de calculer les circonstances de l’éclipse en un lieu donné dont on connaît les coordonnées à la surface de la Terre (fig. 4). Ces calculs sont effectués facilement sur un micro-ordinateur ou même sur une calculatrice programmable.Périodicité des éclipsesAu bout d’un saros, une éclipse ne se reproduit pas d’une façon tout à fait identique car, la commensurabilité entre les révolutions synodique et draconitique de la Lune n’étant qu’approchée, les positions relatives du Soleil, de la Lune et du nœud ont changé. Compte tenu des diamètres apparents minimal et maximal de la Lune et de l’inclinaison de l’orbite lunaire sur l’écliptique:– une éclipse de Lune ne se produit pas si le centre de la Lune est à plus de 12,50 de l’un des nœuds de son orbite au moment de la pleine Lune; elle se produit de façon certaine s’il est à moins de 90 du nœud;– une éclipse de Soleil ne se produit pas si le centre du Soleil est à plus de 18,50 de l’un des nœuds de l’orbite lunaire; elle se produit de façon certaine s’il en est à moins de 13,50.Sur un intervalle de 72 saros (environ 1 300 ans), on a une douzaine d’éclipses partielles de Soleil de grandeur croissante, puis 48 éclipses centrales (totales ou annulaires) suivies de 12 éclipses partielles de grandeur décroissante.Pour les éclipses de Lune durant la même période de 72 saros, on a 12 éclipses par la pénombre, suivies de 12 éclipses partielles par l’ombre, puis de 12 éclipses totales de grandeur croissante. On a ensuite 12 éclipses totales de grandeur décroissante, 12 éclipses partielles par l’ombre, puis 12 éclipses par la pénombre.Si l’on compte toutes les éclipses, c’est-à-dire même les éclipses de Lune par la pénombre, il y a au moins 4 éclipses par an, dont 2 de Soleil et 2 de Lune; au plus, il peut y avoir 7 éclipses par an: dans ce cas, il n’y a jamais une éclipse de Soleil et 6 de Lune ni une éclipse de Lune et 6 de Soleil, mais toutes les autres combinaisons sont possibles.Intérêt astronomique des éclipsesLes éclipses de Soleil et de Lune ont joué un rôle important en astronomie. Aujourd’hui, seules les éclipses de Soleil présentent un intérêt pour les astronomes, car elles permettent d’étudier la couronne solaire.Cependant, des éclipses d’autres corps du système solaire présentent toujours de l’intérêt. Ainsi, les quatre gros satellites de Jupiter découverts par Galilée en 1610 s’éclipsent quand ils passent dans le cône d’ombre projeté par la planète géante. En étudiant le décalage observé entre l’instant du phénomène et l’heure prévue par les tables, Ole Römer a pu montrer, dès 1675, que la lumière se propage à vitesse finie et donner une bonne évaluation de cette vitesse. De nos jours, les astronomes observent attentivement les éclipses mutuelles des satellites galiléens qui se produisent quand un satellite se trouve plongé dans le cône d’ombre projeté par un autre. De tels phénomènes sont observables pendant des périodes de plusieurs mois qui reviennent tous les six ans. Ils permettent d’améliorer la théorie des mouvements des satellites galiléens, ce qui est très utile à l’astronomie spatiale.
Encyclopédie Universelle. 2012.